Une interview réalisée par la page Tambours et Trompettes
Une collaboration entre Tambours et Trompettes, page Facebook bien connue des passioné.e.s de Folklore, et Petit Gille est née. Vous trouverez, durant les prochains mois, une flopée d’interviews d’hommes et de femmes vivant leur passion du carnaval à 200%.
Musicien sorti tout droit de l’Académie, Michael Moulin gère son « Band » avec un certain succès…
Les percussions sont essentiels pour faire danser le Gille… Mais est ce que les cuivres n’apportent pas cette petite touche harmonieuse supplémentaire? Moins présents que les tamboureurs et batteurs de caisse en terme d’heures, ils sont pourtant les protecteurs du cahier musical composé des 26 airs traditionnels. Et du » Mitant des camps « , annoncé dans plusieurs carnavals autres que Binche, Morlanwelz…
L’ambiance en batterie est une chose, celle en musique n’est pas mal dans son genre! On connaît certaines « passes » de folie dans la région: je pense à la rue Bard, le rue des Ecoliers à Binche, la rue des Amours à La Louvière, la Rue Belle-Hôtesse à Morlanwelz et bien d’autres encore… A l’annonce de Polka Marche, Trompettes des cent gardes, Le juif errant… C’est toute une société qui se retrouve en symbiose et en transe!
Comme premier musicien, c’est un trompettiste qui prend la parole. Il se prête avec passion à notre questionnaire.
Alors Michael, parlons origine et parcours folklorique… A toi la parole…
M.M: Je suis originaire du Roeulx , j’ai été baigné dans le folklore par mon Papa qui y faisait le Gille. J’ai donc aussi fait le Gille pendant 14 ans . Tout petit j’ai appris seul les airs traditionnels du carnaval. Quand je faisais le Gille, je n’avais qu’une envie, c’était me changer pour y jouer du tambour. C’est comme ça que j’ai commencé à jouer, à l’âge de 4 ans dans la batterie de Jean Duvivier . Mon idole était Luc Therace qui y était tamboureur , je pleurais d’ailleurs car je ne pouvais pas jouer à ses côtés …Jean m’obligeait de jouer entre lui et Franz El Bouchie…
J’ai ensuite rejoint la batterie de Jean Claude Denis vers l’âge de 15 ans pour ne plus la quitter . Pendant cette période j’ai aussi joué quelques carnavals avec Jean-marc Stilman. Étant à l’Académie j’ai dû choisir un 2ème instrument, c’est comme ça que je me suis mis à la trompette . Fin des années 80 j’ai joué de la trompette lors de quelques soumonces et un Mardi Gras avec la musique d’Elie , il m’a ensuite proposé quelques carnavals que j’ai décliné pour me consacrer uniquement au tambour . J’y ai joué jusqu’en 2005 pour ensuite me remettre à la trompette et rejoindre la musique de Jean-Claude Denis.
Tu penses avoir réalisé combien de carnavals différents? tambour et trompette confondus…
M.M: J’ai roulé ma bosse un peu partout et quand je calcule je suis à plus de 20 carnavals différents dans la région …
Et aujourd’hui, où peut on te voir jouer?
M.M: Aujourd’hui, à Binche , Nivelles , Bracquegnies , Houdeng , Ressaix , Maurage , Manage , Templeuve, Soignies .
Michael, 10 carnavals ce n’est pas de trop? Il te reste des congés disponibles pour les vacances?
M.M: Nous avons la chance de commencer entre 16h et 17h le lundi et le mardi dans certains carnavals. Mon boulot me permet d’avoir une certaine flexibilité , j’arrive donc à combiner les deux, ce qui fait que je limite au maximum les jours de congés .
Je pense que tu es le chef de musique?
M.M: Oui c’est exact je suis chef de musique depuis maintenant 5 ans .
Tu as donc repris le rôle de Jean-Claude Denis? Comment as tu été choisi?
M.M: Il y a quelques années, Jean-Claude avait émis le souhait de se retirer comme chef de musique , les choses ne ce sont pas passées comme prévu , suite à cela, il y a eu une scission de la musique . Jean- Claude a alors reconstitué sa musique avec une partie des musiciens restants ,j’étais bien entendu à ses côtés. Après avoir remis la musique sur les rails, comme il arrivait tout doucement à la fin de sa carrière, son but n’était pas de rester chef. C’est comme ça que j’ai repris le flambeau . J’ai d’ailleurs toujours la chance et l’honneur d’avoir Jean-Claude à mes côtés comme musicien .
Quel est exactement le rôle de chef de musique?
M.M: Mon rôle est bien entendu de faire en sorte que l’harmonie et la partition soient respectées entre les différentes lignes d’instruments . Il faut également gérer la formation des équipes ,car nous avons parfois 2 soumonces qui tombent en même temps. Je travaille alors avec d’autres chefs de musique pour avoir la possibilité de me dépanner .
Bien entendu je veille aussi à la bonne collaboration entre la musique et la batterie avec qui nous jouons. Je profite d’ailleurs pour remercier l’ensemble des batteries avec qui nous partageons notre passion dans les différents carnavals .
De combien de personnes est composé une musique?
M.M: Cela varie en fonction des carnavals , mais généralement on tourne entre 15 et 20 musiciens .
Votre formation est jeune d’âge? As tu l’occasion de former des jeunes musiciens?
Les diriges tu vers l’Académie? une fanfare?
M.M: On a une bonne combinaison entre les générations dans notre équipe, je ne forme pas de musiciens mais c’est toujours avec plaisir que j’en accueille dans la musique. La meilleure école reste de toute façon l’Académie .
En tant que musicien, quel est le carnaval le plus difficile à jouer? et Pq?
M.M: Il n’y a pas vraiment de carnaval plus difficile , chaque carnaval a ses spécificités, avec des moments et des endroits où la fréquence des annonces est plus importante. Bien entendu, les premières soumonces sont plus difficiles car les heures de prestations sont là. Et nous avons les lèvres qui n’ont plus été habituées à ce nombre d’heures effectuées .
J’ai parfois l’impression que le musicien de bouche est rangé au second plan comparé aux tamboureurs ou batteurs de caisse? Je me trompe?
M.M: Nous ne sommes pas rangés au second plan mais nous n’avons effectivement pas la même relation avec les Gilles que les tamboureurs . Ce qui est logique le tamboureur passe plus de temps avec les Gilles, il mange chez lui, il y a le ramassage , la bande de nuit, tout cela crée des liens étroits , donc nous avons une relation complètement différente .
Après, avec l’accumulation des années, cela s’estompe et nous avons aussi une réelle amitié qui se noue avec les Gilles, preuve à chaque fin de prestation quand la société vient nous saluer en nous remerciant .
En tant que trompettiste, as tu l’occasion d’être l’annonceur dans les rondeaux?
M.M: Non car j’ai un annonceur donc c’est lui qui annonce mais cette année lors du Mardi Gras à Binche , j’ai eu l’occasion de diriger le rondeau du soir, ce qui reste un magnifique souvenir .
Comment as tu ressenti le moment? un stress de mal annoncer? un honneur d’annoncer face à tous les musiciens?
M.M: Il y a toujours un léger stress mais en fait tout est orchestré par l’artificier , c’est lui qui vient te donner le nombre d’airs qui sera joué pendant le feu, avec le final que tout le monde connaît. Lui est relié par téléphone à son équipe qui tire le feu , donc il donne la fréquence des annonces, cela tombe pile-poil quand les dernières notes du Petit jeune homme de Binche sont jouées .
J’imagine que amoureux du folklore comme tu l’es, la crise que nous vivons t’impacte également? Depuis quand n’as tu plus joué?
M.M: La dernière fois que nous avons joué c’était le lundi du carnaval de Nivelles … Effectivement c’est une situation compliquée mais nous n’avons pas le choix , nous devons prendre patience. Il s’agit d’une crise importante avec trop de pertes humaines, nous ne pouvons pas l’ignorer! De loin ou de prêt, il y a des personnes que nous côtoyons de par notre passion, notre folklore, qui sont touchées. Mes pensées iront à toutes ces familles . Je reste convaincu que notre folklore reviendra plus fort …l’Aubade , le Pas de charge , le Petit jeune homme, Mitant des camps retentiront à nouveaux …
Tu as des contacts avec les sociétés pour qui tu joues?
M.M: J’ai très peu de contact. Après, avec les réseaux sociaux, cela permet d’avoir toujours des nouvelles de tout un chacun. Il ne faut pas se leurrer, on est tous un peu groggy par la situation.
Michael, tu ne m’as encore mentionné ta participation actuelle au carnaval du Roeulx…Toujours membre de la société des Paysans, non?
M.M: Alors le carnaval du Roeulx comme je l’ai mentionné plus haut c’est là que tout à commencé , j’ai fait le gille , joué du tambour pour les Gilles, pour les Paysans et maintenant effectivement, je suis membre de cette magnifique société . Comme tous les carnavals nous sommes aussi dans l’incertitude mais effectivement je devrais y participer en 2021 .
Je pense que tu y es entouré d’une belle bande d’amis?
Alors oui nous sommes une bande d’amis comme tu l’écris , de ma génération on a presque tout fait ensemble , l’école , communion , foot , etc… cela reste toujours un plaisir de se retrouver , nous avons une ambiance de feu , une magnifique batterie , une magnifique musique , que veux tu de plus? … Tout est réuni pour passer des moments merveilleux .
Une dernière question, si tu avais un dernier souhait, ça serait : refaire un carnaval au tambour, rester musicien le plus longtemps possible, reporter un jour le costume de Gille, ou rester Paysan du RÛ jusqu’au bout?
M.M: Alors je dois t’avouer que le tambour reste mon instrument de cœur, de prédilection. Maintenant ta question m’interpelle , j’avais un énorme souhait Quentin, c’était de rejouer une soumonce au tambour aux cotés de Luc , j’en avais discuté avec lui à Carnières et il m’avait confirmé qu’il n’y avait aucun souci .Malheureusement cela n’arrivera jamais …
Maintenant je continuerais à jouer tant que la santé me le permet car les années défilent …
Souhaites tu ajouter quelque chose Michael?
M.M: D’abord je te remercie de m’avoir contacté pour cette interview cela m’a permis de me replonger dans certains souvenirs .
Je souhaite à tout le monde beaucoup de courage dans ces moments difficiles , d’excellentes fêtes de fin d’année , une bonne et heureuse année 2021 et on se retrouvera bien vite sur le pavé .
Et bien merci à toi d’avoir joué le jeu jusqu’au bout… C’était un réel plaisir de réaliser cette interview avec toi.
Nous espérons avoir d’autres musiciens en ligne afin de découvrir les histoires des uns et des autres!
Bien sûr, la musique preste pour les acteurs en premier lieu. Mais c’est toute une population qui aime danser derrière chaque société, au son des cuivres. Si vous habitez non loin du centre de votre ville ou village, et que vous aimez le folklore… Il est impossible de rester enfermé dès que les premières notes se font entendre! La musique apporte aussi l’aspect de puissance, elle est demandée d’abord comme harmonieuse mais de par son nombre, elle dégage un volume impressionnant.
Avis aux amateurs d’histoire, l’origine exacte des airs traditionnels n’a jamais été confirmée.