Yves Depreter et ses amis réunis

Et au milieu des champs, s’est créée ,il y a longtemps, une belle bande « d’Amis réunis »…

Made in La Louvière!

En vous rendant à une soumonce de La Louvière, vous ne pouvez pas vous tromper: les « Amis Réunis » sont généralement reconnaissables et différents des autres sociétés. C’est simple, lors des deux premières sorties, ce sont les seuls qui arborent une casquette à carreaux ornée d’un Pompom rouge.

Le mardi du carnaval, ils ne sortent plus en costume de Gille mais bien en « travestis ». Le choix du même déguisement pour tous est issu d’un thème qui leur est cher.
Société à mes yeux, très familiale où il y règne une excellente ambiance.

Son président, Yves Depreter est notre nouvel interviewé. De par son parcours vécu, son ADN, ses connaissances multiples, il répond et nous partage sa passion pour sa société et son carnaval.
Yves, à toi la parole…

Peux-tu te présenter à nos membres? Quel est ton parcours « folklorique »?
Y.D: Je suis né dans le monde du carnaval, mon papa faisant le gille aux Amis Réunis.
J’ai fait le gille pour la première fois à 2 ans et je n’ai jamais arrêté.
A l’âge de 18 ans, j’ai intégré le comité de la société dont mon papa était président.
J’ai appris énormément au contact des ‘anciens’.
Après avoir assuré le rôle de trésorier pendant quelques années, j’ai succédé à mon papa en 2002.

Qui sont Amis réunis de La Louvière? ( origine de la société, nombre de membres, un peu d’histoire, particularités, … )
Y.D: La société a été fondée en 1878 dans le quartier du Mitant des Camps.
En 1964, vu la diminution du nombres de membres, le comité a pris la décision de quitter le quartier pour établir le local au centre ville. C’est le café « Le Succès » qui a été choisi. A cette époque, la société ne comptait plus que 23 unités.

A partir de ce moment-là, le groupe va progresser et aujourd’hui la société compte 145 membres dont 30 jeunes gilles de moins de 16 ans.

L’esprit Amis Réunis se base sur 3 principes :
⦁ L’amitié : Les Amis Réunis forment une grande famille, tous les membres se connaissent et sont solidaires.
⦁ Le respect : Respect de la tenue du gille, respect entre les membres, vis à vis de la batterie, de la musique, des autres sociétés, du public et des cafetiers que nous visitons.
⦁ L’amusement : Pour passer un bon carnaval, le gille doit s’amuser.
Cet esprit Amis Réunis est inculqué aux membres dès leur accueil au sein de la société.

Nos particularités :
⦁ La casquette à carreaux et Pompon rouge portée lors des soumonces depuis 1967.
⦁ Le mardi du Laetare en travestis, une tradition depuis 1952.
⦁ L’air du Mitant des Camps, véritable hymne de la société. Nous restons attaché au quartier où est née la société.
⦁ L’amitié qu’il règne entre les membres, la batterie et la musique.

Quel est ton rôle en tant que président, rôle qui se transmet de génération en génération?
Y.D: Le président est là pour diriger la société. Mais une personne seule ne peut y arriver et c’est donc le comité en entier qui est le plus important. Nous avons la chance d’avoir une très bonne équipe depuis de très nombreuses années. Le comité doit assurer l’organisation du carnaval en faisant perdurer l’esprit Amis Réunis et en veillant à avoir un budget en équilibre. C’est en équipe qu’on y arrive !

Quelles sont vos activités durant l’année?
⦁ Durant le week-end de la braderie de juin, nous avons un stand ‘Quintine’.
⦁ Début septembre, nous organisons notre concours de pétanque.
⦁ Début novembre, notre week-end restaurant qui reste notre activité principale. Durant ce week-end, nous servons près de 500 repas; la soirée du vendredi marquant les retrouvailles avec la batterie et la musique.

Quel est le déroulement de vos soumonces et jours de carnaval?
Y.D: La répétition de batterie se déroule début janvier. Les membres se réunissent au Local pour écouter les premiers « avant-diner » joués par la batterie. Ensuite la société visite quelques cafés.
La soumonce en batterie huit semaines avant le carnaval.
La soumonce en musique cinq semaines avant le carnaval.
La soumonce costumée deux semaines avant le carnaval.

Les trois jours du carnaval

Dimanche :
⦁ Les ramassages dès 4h.
⦁ Le rondeau de la société en batterie avec clarinette face au local à 9h.
⦁ L’ensemble des sociétés se regroupent sur la Place Communale pour le rondeau de 12h30.
⦁ Dès 17h, la société se réunit et redémarre pour la soirée.
Une année sur trois, nous participons au feu d’artifice de 21h sur la Place Communale.

Lundi :
⦁ Les ramassages se réunissent vers 10 h dans le centre ville. Nous sortons en batterie, c’est vraiment un très bon moment du carnaval qui attire de plus en plus de public.
⦁ L’après-midi le cortège démarre à 17 h de la Place Maugretout.
⦁ A la fin du cortège, toutes les sociétés se retrouvent sur la place Mansart pour le rondeau.
⦁ Après un arrêt pour se restaurer, nous repartons pour la deuxième folle nuit du carnaval.

Mardi :
⦁ Une de nos particularités, nous sortons travestis avec un costume commun à l’ensemble de la société.
⦁ Les ramassages se rassemblent vers 15h sur la Place Maugretout.
⦁ A 21h, la société quitte la Place Mansart en empruntant la rue des Amours pour rejoindre la rue de Bouvy face au Château Gilson où est tiré notre feu d’artifice. Ce passage dans la rue des Amours se déroule dans une ambiance exceptionnelle.
⦁ Après le feu d’artifice, nous profitons de la dernière nuit de carnaval et rentrons au local à l’aube.

Quels sont les moments clés à ne pas rater?
Y.D: Tous les moments du carnaval sont beaux et méritent d’être vécus. Il est difficile d’en extraire certains mais j’en vis plusieurs de manière plus intense.
⦁ L’habillage en famille suivi du ramassage du dimanche matin; c’est le début du carnaval, l’émotion est grande.
⦁ Le prise des chapeaux le dimanche matin face au local à 9h30 avec le premier Mitant des Camps du carnaval. Du plus loin que je m’en souvienne, j’ai toujours vécu ce moment avec une émotion intense.
⦁ La matinée du lundi en batterie qui est un moment très convivial entre ‘Louviérois’.
⦁ Notre feu d’artifice du mardi soir avec l’approche via la rue des Amours.
⦁ La dernière nuit du carnaval, avec la musique qui nous rejoint et nous accompagne jusqu’à l’aube…
Il faut avoir vécu cette nuit-là pour se rendre compte de l’ambiance qui anime le groupe.

L’air du Mitant des Camps a-t-il été créé réellement pour votre société?
Y.D: L’air du Mitant des Camps est vraiment l’hymne des Amis Réunis étant donné l’origine de notre société. A la création de la société, son nom était d’ailleurs ‘Les Amis Réunis du Mitant des Camps ».
Cet air serait né en 1885 à la suite d’un croisement prolongé entre les Gilles de Bouvy et les Amis Réunis dont les gilles du Mitant des Camps sortirent ‘vainqueurs’.
L’air du Mitant des Camps devint incontournable après la guerre 40-45.
En effet, en mai 1944, la gare de formation d’Haine Saint Pierre et, par la même occasion, le quartier du Mitant des Camps furent bombardés.
Les habitants du Mitant des Camps regroupés dans des abris qu’ils avaient construit dans les terrils du quartier se mirent à chanter ‘Mitant des camps ne périra pas’.
A la sortie de la guerre, ce refrain que tant avaient fredonné dans leurs abris au Mitant des Camps fut repris par la société, qui en fit très vite un air de Gilles incontournable.

Pourquoi sortir déguisé le mardi?
Y.D: C’est au début des années 50 que cette tradition est née.
A l’époque, le mardi de carnaval ne connaissait pas le succès qu’on connaît aujourd’hui.
Le comité décida de se déguiser le mardi pour développer cette dernière journée de carnaval.
Cette sortie en travestis du mardi devint vite une tradition à laquelle la société tient encore aujourd’hui plus que jamais.

L’entente avec les autres sociétés est-elle bonne?
Y.D: Grâce au travail de l’Amicale depuis de nombreuses années, l’entente entre les sociétés n’a jamais été aussi bonne qu’aujourd’hui.
C’est toujours un réel plaisir de pouvoir retrouver les amis des autres sociétés que ce soit lors des réunions d’Amicale ou lors des soumonces et carnaval.
Depuis plusieurs années, les présidents des différentes sociétés ont créé des liens d’amitié entre eux.
Nous nous retrouvons d’ailleurs dès le mois d’octobre autour d’un bon repas.
Et le lundi matin de carnaval, nous nous retrouvons pour prendre un verre ou deux tous ensemble. De très beaux moments de convivialité.

Des projets pour le futur de la société?
Y.D: La crise sanitaire nous oblige à nous ‘réinventer’ ; il faudra du temps pour revenir à la vie d’avant.
Nous organiserons dans les prochaines semaines un souper virtuel. Celui-ci avait été fixé en novembre dernier mais le durcissement des mesures nous avaient poussés à postposer cette activité. Il faut noter qu’en trois semaines nous avions reçus près de 700 réservations de repas. Un exemple du fonctionnement de l’esprit Amis Réunis.
D’autres projets pour cette année sont en cours de préparation et nous ne manquerons pas de communiquer à ce sujet dans les prochains mois.

Penses-tu à d’éventuels changements à apporter pour le carnaval de La Louvière? Une évolution possible?
Y.D: Vu la crise que nous traversons actuellement, je pense qu’il faudra surtout maintenir le niveau de notre carnaval.
Néanmoins, un folklore évolue et nous restons ouverts aux idées qui peuvent faire progresser notre carnaval.

Un petit mot que tu dédies à votre batterie et votre musique.
Y.D: L’amitié et la stabilité sont les mots qui qualifient le mieux nos relations avec la batterie et la musique.
Ils font partie intégrante de notre société.
Je parle de stabilité car aussi bien la batterie de Larry Dubois que la musique de Carl Verhofstadt jouent pour nous depuis de nombreuses années.
La batterie et la musique forment un bel orchestre où il règne une très bonne entente.

Deux années sans carnaval, quel est ton ressenti? Comment envisager le retour des festivités?
Y.D: Avant tout, je tiens à signaler que l’annulation de ces deux éditions du carnaval était la seule solution.
Ça avait déjà été très difficile en 2020 mais là on avait pu vivre nos activités, la répétition de batterie et les soumonces.
Ici pour 2021, nous n’aurons rien ; ce sera encore plus difficile à vivre.
Mais il faut garder le moral et se dire qu’une fois que nous aurons traversé cette crise, nous pourrons nous retrouver tous ensemble.

Un petit mot que tu dédies aux cafetiers et indépendants qui ont du mal actuellement?
Y.D: Les mots sont difficiles à trouver pour les soutenir tant la situation qu’ils vivent actuellement est pénible. Dans le monde du carnaval, les cafetiers vont certainement avoir des difficultés à se redresser après cette crise. Nous devrons être solidaires pour pouvoir les aider.

Symboliquement, que mettre en place pour compenser ou « célébrer » 2021?
Y.D: Vu l’évolution incertaine de la situation sanitaire, il est très difficile de prévoir une activité pour ‘célébrer’ 2021. Néanmoins, il est certain que dès les restrictions levées, nous organiserons une sortie pour réunir tous nos membres et sympathisants.
Actuellement, le rôle de notre comité est de garder le contact avec nos membres pour que tout le monde reste mobilisé dès la reprise.

Si tu devais dire quelques mots aux membres de ta société ainsi qu’aux acteurs du folklore en général, quels sont-ils?
Y.D: Soyons prudents et patients et nous pourrons ainsi tous revivre les moments de notre carnaval que nous aimons tant .

Q.B: Merci à toi Yves pour ce beau moment de partage. Merci également pour tes quelques mots en privé à l’égard de notre groupe FB, ça fait plaisir à l’équipe!
Tu t’en es souvenu, j’ai eu l’occasion de partager un carnaval à vos côtés en tant que jeune tamboureur. J’avais eu la chance d’apprendre certaines bases avec Albert Catterman, ancien chef de batterie dans votre société. J’ai connu, cette année-là, la passation du rôle de chef entre Albert et Larry.

Il faut quand même signaler que, le carnaval de La Louvière en tant qu’acteur, c’est une participation physique de +-110 heures (soumonces et jours de carnaval). En heures prestées, c’est clairement le carnaval le plus long et, par conséquent, le plus difficile physiquement pour chaque acteur. Mais l’ambiance est grandiose, aussi bien dans les sociétés que dans les cafés et dans les rues!

Une anecdote vécue: mardi 1h du matin, nous sommes dans une salle à l’arrière d’un établissement sur la place Mansart. La musique vient de prester ses derniers airs du carnaval, la batterie s’apprête à jouer jusqu’à l’aube. La fatigue est bien présente pour tout le monde. Un livreur rentre dans la salle avec des cartons de pizzas par dizaine, le comité des Gilles apporte à son tour des bouteilles de champagne. Un festin de luxe qui vient récompenser batterie et musique, je n’avais jamais vu ça auparavant. Un magnifique souvenir!

Cette même année, soumonce en batterie: la neige a commencé à tomber vers midi, début de ramassage! Elle s’est arrêtée vers 4h du matin en même temps que les sociétés. Une véritable soumonce « blanche »…et toujours une terrible ambiance au sein des « Amis Réunis ».

Encore une fois, nous avons vraiment la chance de vivre des moments uniques grâce au folklore régional et, ce, dans chaque carnaval…

Alors Yves, comment terminer cette interview autrement que par:  » Mitant des camps ne périra pas » ? Tambours!

Quelques liens vidéos sympas à regarder:

https://www.youtube.com/watch?v=jP0J_vuDfts…
https://www.youtube.com/watch?v=h19giFpmESE…
https://www.youtube.com/watch?v=K7Y42zTdu68…
https://www.youtube.com/watch?v=H9qedOWnic8…
https://www.youtube.com/watch?v=Lf9bpec2dZQ…
https://www.youtube.com/watch?v=n8L3Xw341ag…
https://www.youtube.com/watch?v=_Zvb3hTVf6o…
https://www.youtube.com/watch?v=TXHhR9SuEYQ…
https://www.youtube.com/watch?v=HoCHcK7EEOE…

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